Extrait 5 Chap XIII

Commentaire extrait 5, Thérèse Raquin d’Émile Zola

 


Le roman « Thérèse Raquin », publié en 1867 est la première grande œuvre de Zola. C’est avec ce roman que l’on commence à définir Émile Zola comme naturaliste : il représente un côté de la société oublié dans le monde de la littérature, de façon très crue, fataliste et déterministe. Les thèmes traités souvent sont les milieux défavorisés et abandonnés des personnages problématiques créant un crescendo significatif.

Les personnages principaux présentés dans le roman sont Laurent et Thérèse, deux amants, entraînés par une obsession mutuelle qui commettront un crime : le meurtre du mari de Thérèse, Camille. L’assassinat a comme objectif la liberté de vivre leur amour.

Dans cet extrait, le narrateur nous raconte les visites de Laurent à la morgue en espérant de voir le cadavre de Camille, ce qui effectivement a lieu.

Nous allons étudier de quelle manière l’aspect physique pourri de Camille influence les pensées folles de Laurent. Pour répondre à ceci nous commencerons par analyser le cadavre de Camille puis les réactions produites en Laurent.

À première vue, c'est-à-dire, le corps de Camille, le narrateur nous décrit un visage qui semble maintenir sa vivacité : « sa face paraissait encore ferme »l.21 avec l’adverbe « encore », il y a une persistance d’une action de vie ; « en gardant une apparence humaine »l.31, les deux premiers mots sont aussi de continuité, une constance dans l’action. Suivant par le corps, on nous décrit une masse en état de pourriture : « chairs dissoutes »l.33. De plus, le suffixe « âtre » nous propose une dégradation du corps: « langue noirâtre »l.30 ; « la peau avait seulement pris une teinte jaunâtre et boueuse »l.23 ; « poitrine verdâtre »l.36. Finalement pour son ensemble « il faisait tout un petit tas »l.46, représente sa fragilité, ce qui est une espèce de perte de dignité humaine.

C’est ainsi que nous passons de son apparence à son existence en faits concrets.

Il « avait séjourné »l.20, sa mort est décrite comme un voyage dans la Seine mais encore une fois, il n’est pas décrit comme une fin mais comme la continuation de sa vie. Ensuite, une description est faite : « grimaçait »l.24 ; « ricanement »l.28, ce sont des actions d’une personne en vie or il est mort ce qui le rend diabolique. Comme précédemment, on voit une perte de dignité avec « là un employé à 12 cents francs »l.57, critiquant l’aspect indigne des travailleurs avec ce salaire. Il commence à posséder des réactions physiques inconscientes à l’être vivant : « grelottait »l.49 ; « exhaler ce corps »l.56 ; « Camille le regardait »l.3.

Camille est dans une limite entre la vie et la mort, une espèce de fantôme qui viendra les hanter, comme l’opposition de l’aspect pourrissant et les actions en vie, mais dans un corps mort, nous le montrent. C’est ainsi que toutes ces sensations provoquent quelque chose d’étrange en Laurent.

Laurent présentera une progression dans ses sentiments. Il commencera d’abord par une sorte d’absorption : « ne pouvant détacher ses regards »l.11 et « comme attiré »l.11 ce qui indique fascination ; « contemplation inconsciente »l.16 ; « curiosité poignante »l.51 est une hyperbole en exagérant l’impact produit en Laurent. C’est comme si Laurent serait en face à quelque chose de magnifique qui nécessite de toute son attention et qui semble inévitable de le voir.

Ce sont des souvenirs et pensées constantes, « la nuit »l.1 au « matin »l.2 perdure tout le temps, sans repos, c’est quelque chose de cyclique ; « chaque jour »l.3 ; il y a une utilisation des tournures restrictives « que deux visites »l.5 par jour. Il se montre discret,  « s’approche lentement »l.10 ; « immobile »l.15 ; « 5 grandes minutes » une hyperbole pour ralentir le temps. Ce sont tous des actions lentes, d’insécurité devant la situation, il se soumet à un masochisme.

Passant à la dernière sensation : « immobile, sortir, marcher rapidement »l.53, c'est-à-dire une progression dans les mouvements lents à rapide ce qui amène aussi un changement d’attitude. Ce changement d’attitude pourrait être décrit comme une tranquillité finale : « tranquille désormais »l.63 qui est une ironie que laisse entrevoir l’opinion de l’auteur sur l’état psychologique de Laurent car il ne devrait pas être dans cet état d’esprit, tout le contraire; « jette avec volupté dans l’oubli » l.64 une hyperbole qui nous veut dire que laisse de côté toute cette situation, mais il ne saura pas les conséquences qu’il devra résister plus tard.

Grâce aux procédés stylistiques qui qualifient Camille, des effets mentaux sont produits en Laurent, nous nous rendons compte des sensations de ce dernier. Il se produit un changement au long de l’extrait, il passe d’un état plutôt rationnel avec de l’angoisse et culpabilité à une espèce de folie car il deviendra insensible à toute émotion, il devient froid envers tout ce qui se passe.